Étape importante dans le processus de composition, le mélange recrée un nouveau timbre à partir de plusieurs éléments (objet composé, fusion, rejet) ou au contraire associe différentes voix musicales (chaînes sonores), et crée des interrelations variées (musique mixte et interactive, fonds-figures, polyphonies)
Concernant les musiques populaires versus musiques « savantes », se dégage un aspect symbolique intéressant qui se reflète dans l'équipement des studios : sortir de la coïncidence temporelle de la musique instrumentale tout en garantissant une permanence musicale malgré les libertés rythmiques individuelles (aléatoires). La synchronisation temporelle très précise, justifiée par les nombreuses attaques des sons instrumentaux, et par le langage rythmique pulsé et mélodico-harmonique, impose une horloge-maître dans le studio qui synchronise tous les outils électro-acoustiques.
Au contraire, les musiques contemporaines de flux, sans repères pulsés, n'en n'ont pas besoin. Un synchronisme trop précis sera même contre-productif en conduisant la perception de l'auditeur à accorder de l'importance à quelques événements plus qu'à d'autres.
Voici un exemple de fausse situation : Olivier Messiaen Chronochromie, dans le 4e mouvement, Épode pour 18 violons, chaque partie est individuelle, mais la mesure est en 4 temps. Pour ne pas manquer les moments de coïncidence, les musiciens transforment parfois le flux sonore en temps forts audibles.
Dans une session de mélange électroacoustique, c'est le « poids » réciproque des matières qui est en jeu. La balance en est très fragile, car les rapports peuvent être facilement inversés. Un geste minimal sur les potentiomètres réels ou virtuels de la console de mélange conditionne le résultat. Il arrive souvent que l'œil soit trompeur : la résultante audible peut, en raison des matières mélangées, être l'inverse de ce que l'œil voit sur la console.
C'est aussi un jeu sur le temps, car en dosant plus ou moins la phrase, on la forme, on corrige sa durée. La vitesse du geste sur les potentiomètres s'adapte à celle de chaque geste musical, phrase à mélanger. Deux voies ou plus de mélange étant prêtes, il faut donc trouver un parti-pris contrôlé, un phrasé. Le geste, l'écoute et l'instinct musical recréent une intentionnalité claire.
Méthode : Méthode de travail
La pensée est polyphonique, l'écoute porte sur deux chaînes acoustiques au moins. Aucune prévisibilité n'est possible : tout se construit par essais et erreurs successifs : Démarche concrète.
Deux méthodes
Le mixage-plan : Toutes les amplitudes sont calibrées en détail, son par son, ou groupe par groupe. La synchronisation de chaque voie de mixage est préparée, fixée.
Le mixage en temps réel : la synchronisation des voies de mixages est préparée, mais pas les niveaux d'amplitudes. Le « mix » est joué, semi-improvisé, en plusieurs versions soit entier (toute la durée de l'œuvre, cas plus rare), soit par sections dont les meilleures versions seront ensuite reliées les unes aux autres par tuilage, fondu-enchaîné, articulations et toutes formules de transitions.
En studio analogique
Le mixage-plan est possible, c'est un travail lent qui demande des copies des séquences et sons travaillés et un jeu précis d'amorces pour démarrer les diverses séquences de pré-mixage au moment voulu sur chaque lecteur.
Le mixage en temps réel sur une console de mélange est comparable à un jeu instrumental : essais, répétitions de traits, ratés, exaltation des instants réussis... Il demande une partition des opérations à faire à la console. Si le studio dispose d'un ou plusieurs lecteurs multipistes, les pré-mixages y sont reportés, synchronisés, ce qui simplifie le travail à la console qui peut se concentrer sur les niveaux d'amplitude.
En studio numérique
De facto, la technique proposée par tous les logiciels de lecture, traitement et enregistrement audio est celle d'un énorme lecteur multipiste sur lequel on distribue, synchronise et traite les sons. En modulant les courbes de niveaux uniquement « à la souris », dans une approche lente et précise, on reproduit la technique du mixage-plan.
L'approche plus intuitive du mélange semi-improvisé sur une surface de contrôle retrouve le plaisir du geste et de la rétroaction main/oreille de l'instinct musical, d'autant plus que les mémorisations de ces gestes, et leurs multiples corrections permettent un grand confort de travail, étant assuré de pouvoir revenir en arrière pour corriger quelques moments précis.
Conseil : Commentaires
Regarder les haut-parleurs, être plongé dans le son et non dans le geste, ou l'écran d'un ordinateur.
Précision du geste par rapport à l'écoute, technique de mélange par rapport au son (et non sa visualisation !).
Rendre un son plus présent et vivant, le but étant musical.