Le montage est l'essence même de l'écriture sur support (celle des <sons fixés>[*] selon la terminologie de Michel Chion), qui permet les possibilités musicales offertes par l'acte, très déterminé, de couper, coller, interrompre, insérer, changer de plan (au sens cinématographique), faire apparaître ou disparaître un événement sans avertissement et comme par enchantement, celui de nos arrières grand-mères devant les films de Mélies, créer des êtres sonores chimériques.
Il s'agit donc, depuis que la musique électroacoustique existe grâce à la bande magnétique, de « couper » résolument dans un déroulement temporel.
Présentation du programme de travail⚓
Introduction d'un principe de montage dans une séquence-jeu
Le déroulé temporel d'une séquence est interrompu par des figures de montage qui réveillent l'écoute et relancent le phrasé, ou servent d'articulation pour briser sa logique, devenir transition.
Exemples :
•substitution d'attaque : remplacer une attaque par une autre (objet composite de deux éléments)
•delta composé par resserrement d'un même objet (le son est coupé en son milieu)
•delta pur : attaque douce, profil de masse, résonance
Exemple : Exemples
Lien entre le monde acoustique et le monde électronique, entre le naturel et l'artificiel.
Ce lien entre deux mondes opposés existe dans une illusion du naturel grâce aux substitutions d'attaques et fausses résonances de verre par synthèse analogique, aux mélanges par fondu-enchaîné et la transformation de la dynamique au potentiomètre de la console de mélange : création de faux deltas.
Sons lisses, peu d'attaques, avec résonance.
Attaques plus sèches qui s'incrustent dans les trames.
D'abord une seule fréquence tenue (entretien continu), puis octave inférieure, puis supérieure, et épaississement de la trame.
Point de vue technique⚓
Le montage sonore existe parce que le support-bande magnétique existe. Il en est la technique d'écriture spécifique, sur ce support. Il s'apparente à bien des égards au montage des films sur pellicule.
En studio analogique
Le montage introduit les questions de copies au maximum d'amplitude sans saturer, pour éviter le souffle.
Méthode : Méthode de travail
Par essais et erreurs : techniques prédisposant à la découverte de quelque chose : c'est la démarche concrète de Pierre Schaeffer[*] . Ce n'est pas un travail d'organisation, de choix, mais il s'agit d'être le plus original possible dans la spécificité ; tout ce qui résulte de l'observation de la chose : rien n'est prévisible.
Conseil : Commentaires
Dans la séquence d'origine, éviter le jeu instrumental au profit de quelque chose qui justifie l'existence du haut-parleur.
La séquence se doit donc d'être plus intentionnelle, plus forte musicalement. Il vaut mieux travailler sur des sons individuels, personnels, mythologiquement différents (en cela les sons électroacoustiques se distinguent des sons instrumentaux, tous du même calibre).
La composition n'est plus une combinatoire de signes, arbitraire et spéculative.
Définition : La morphologie
Écriture où la perception porte sur la masse et la forme dans le temps (enveloppe dynamique) : Forme/Matière[*]
L'écriture et la perception morphologiques sont sans doute une des révolutions musicales du XXe siècle. Le fait d'écrire directement sur support, de pouvoir réécouter à satiété (le <rimage>[*] de François Bayle) des sons très courts comme des séquences entières, fait prendre conscience qu'un son ne s'entend pas seulement comme fréquence, durée, spectre harmonique, mais aussi comme déroulement temporel d'une enveloppe d'amplitude : attaque, entretien, chute (forme), avec sa vie interne et ses caractères de grains (matière).