Pleins et déliés
Le premier titre était “Rebonds”. C'était ça l'idée initiale.
Je voulais travailler sur la notion d'énergies amorties.
Cette idée de rebond m'est venue d'un son (trouvé en travaillant à Points contre Champs). Un son manipulé : c'est transposé dans le grave qu'il m'a donné la sensation de rebondissement. Et il est devenu la colonne vertébrale du morceau.
Imagines que tu joues à la balle dans un lieu sans pesanteur. C'est un jeu avec l'énergie ... Imagine des jongleurs.
Ce morceau me plaît beaucoup parce qu'il est proche du corps. C'est une musique à caractère gestuel. Pour moi c'est une gestique presque chorégraphique. C'est la musique qui envahit le corps. C'est comme ci je dansais en faisant des sons. Je pense aux filets dans lesquels tombent les équilibristes. Une musique d'élasticité.
Le langage définit ce que je voulais faire au moment où j'ai composé, et aussi la perception que j'ai de cette musique maintenant qu'elle est faite. Une partie du propos est contenue implicitement dans la qualité même des sons.
D'ailleurs, j'ai fait mes sons comme ça, instinctivement, avec l'idée très enfouie, ou très à fleur de peau, de rebond, de légèreté, de pesanteur, d'aérien ... Idée qui ne s'est révélée à moi-même qu'après un travail sur eux, de transposition : car à la sortie du synthétiseur, ils n'avaient pas cet aspect ... Il fallait bien sortir de cette espèce de torpeur. Ça pouvait durer pendant des heures ...
Le son final est un laisser-aller ... mais il fallait finir, j'avais cette soupape toute prête, je m'en suis servi ! C'est vrai que le problème de la fin est important pour moi. C'est toute une manière de vivre ... Il faut absolument trouver une solution à tout. On ne peut pas rester cloîtré dans un système statique. Il faut une dynamique. Construire et détruire, faire et défaire. Oui. Peut-être que je n'ai pas un respect excessif pour ce que je fais ?