De la musique à l'école ?
De plus en plus d'artistes confirmés choisissent de lier art et technologie pour servir le sens de leur création. Outre l'hybridation des disciplines (musique, danse, théâtre...) qu'apportent les nouvelles technologies au spectacle vivant ? Pourquoi les novices sont attirés par ces outils ? Qu'en est-il de la musique à l'école ?
Le mythe de la génération connectée ne reflète pas tout à fait la réalité, les enfants n'ont pas tous ces compétences et ce n'est pas forcement leur univers. Le numérique à l'école est un fossé pour ceux qui n'y ont pas accès chez eux, pour autant le fait de travailler la musique avec le numérique peut justement permettre de réduire ce fossé car rares sont les enfants mêmes connectés qui font de la musique chez eux. La nouveauté obligerait les enseignants et les enfants à faire abstraction de ce qu'ils connaissent, cela induirait de nouveaux processus de création avec les enfants.
Festival Oreilles en Boucles
Mireille Poulet-Mathis, présente les expérimentations électroacoustiques des CM1-CM2 de Chambéry-le-Vieux depuis 1999 : une expérience de création musicale à l'école qui est une source de réflexion sur les liens entre le geste musical et l'écoute, le développement de la concentration, la créativité, le sens critique... Elle met en avant l'importance de la collaboration enseignant/MI/compositeur pour pallier les défaillances de compétences individuelles, la transmission d'outils pour analyser une musique. Ce projet reconduit chaque année se décline maintenant dans le cadre du festival Oreilles en Boucles. Pendant trois jours, des classes et leurs musiciens intervenants, venus de toute la Région Rhône-Alpes, présentent à d'autres classes leurs créations. La programmation est enrichie d'ateliers, concerts, performances, tables rondes, exposition. La 3ème édition du festival est prévue fin mars 2018.
Le détournement de dispositifs de jeux vidéos est courant. La Kinect, périphérique de la console Xbox 360 permettant de contrôler une interface sans utiliser de manette, est très souvent utilisée dans le domaine des applications musicales expérimentales du corps connecté. Toutefois, avec l'arrivée des nouveaux capteurs de mouvements (HTC, Myo, etc), de nouvelles interfaces sont développées.
Martin Bouveresse, musicien intervenant ayant mené un projet artistique avec le quartet La Table de Mendeleïev et une classe, pense que cela n'apporte rien de nouveau dans le processus de création des enfants. Il témoigne de la complexité technique de manipulation de la Kinect et de la déception de l'enfant choisi par rapport à ses camarades avec les produits à bulles qui ont été plus dans la poésie.
Maflohé Passedouet, danseuse, touche un public de personnes en situation de handicap mental au travers de détournement des dispositifs de jeux vidéos (Kinect, Wii). Ces interactions permettent de développer la communication non verbale avec des personnes n'ayant pas développé le langage grâce notamment au light painting sonore (générer du son avec de la lumière ex : bâtons lumineux...) et de renforcer les liens entre équipes artistiques et éducatives.
Pour David Guerra et Pierre Amoudruz, l'artiste doit se demander ce qu'il gagne et ce qu'il perd avec ces outils. Le gain serait de l'ordre du sensible : conscience du corps dans l'espace, création d'un lien entre le mouvement et le son... La perte l'est tout autant : que devient le geste instrumental quand il ne reste qu'à appuyer un bouton ?